• DRAOUI AISSA

     

     

     

    DRAOUI Aissa

    dit Mouloud

     "Le géant oublié"

     

    Il avait les larmes aux yeux.C'était une étoile.Elle a décliné parfois pour mieux briller ensuite.Dans les couloirs sombres du stade du "20 Aout" à Skikda, il était émotif,c'était un enfant de 35 ans.Il jouait ce jour-là ses adieux au football.

    Draoui parceque c'est de lui qu'il s'agit, cet inter de charme, petit et pétillant, a fait la joie de l'équipe nationale version 1975,souvenez vous des J.M. La France s'en souviendra longtemps.Il a fait également, lui l'homme généreux dans ses oeuvres magistrales, la fierté d'un Mouloudia d'Alger en mal de notoriété.

    DRAOUI AISSA

     

    A lui seul, face a un grand Chabab de Belcourt ( CRB) en superbe forme,Draoui a dévoilé devant 80.000 spectateurs tout le talent dont les enfants du pays profond sont capables. Dahleb, venu à cette époque-là, d'horizons européens, français précisément, s'en souviendra lui aussi.

    Il est là aujourdh'ui,regardant la mer.Il voit la mousse venir et il rêve.Pêcheur cette fois-çi, il savoure au gré des vagues dociles des satisfactions passées sous d'autres cieux, il prie maintenant que le poisson mord et que revivent les intenses sentiments que le football lui a procurés.

    La mer, elle aussi lui apportera certainement la consolation morale dont il a besoin.Car Draoui n'a pas été de ceux qui ont eu la chance de vivre heureux.Les phénoménales fantaisies de deux jambes qui valsent ne lui ont rien rapporté dans la vie courante.

    Rima c'est sa fille. Elle a peine dix moix.Son prénom est tout un poème.Il veut dire Rhyme.Et pour ceux ceux qui ne comprennent pas, Rhyme c'est la gazelle.Elle se trouve dans un désert impitoyable sec et immense.Son pére, lui, travailleur à la Sonatrach est au bord de la mer.Il n'a plus vingt ans.Chasseur de buts autrefois, il est pêcheur aujourdh'ui.Mais il pêche quoi au fait? il a beaucoup d'eau devant lui.Il ne pêche pas pour faire mal au poisson.Il pêche pour une communion que seul le poisson peut comprendre.Il a vécu des moments pénibles.On a dit de lui que c'était un homme raté.Il a encaissé.Il s'est tu.Il n'a jamais réagi.Sa seule réaction était la bouteille fidéle.

    Il savait qu'il était à l'index.Il savait aussi que les gens étaient méchants.Draoui stratége savait manier un ballon.Et pour avoir pu pénétrer ce "monde", il a compris en homme sage, philosophe souvent, démuni toujours, qu'il était positif dans la vie, de se taire.Ne dit-on pas que les plus violentes douleurs sont muettes?Draoui fut enterré avant qu'il ne soit mort.Il a prouvé par sa classe, par sa finesse, par sa clairvoyance dans le jeu et par ses ruses diaboliques qu'il était un maestro dans la vie et au football.Il a prouvé aussi qu'en dehors du footballeur génial qu'il était, il demeure un symbole de simplicité et de timidité pudique.

    Et pour ceux qui ont pris des pelles pour creuser une tombe profonde à celui qui n'a jamais eu de chance, à celui dont l'amour du prochain s'est confondu avec une réserve immense, à celui qui contre vents et marrées a pris quand même son poisson, à tout ceux-là dont le langage est synonyme de prétention, à ceux dont l'habit n'a émerveillé personne, Draoui a dit j'existe toujours.

    Eh bien à ceux qui ont dit que Aissa s'était clochardisé, Aissa aujourdh'ui donne le meilleur des exemples.Celui d'abord de ne plus boire- puisque boire est décadent-, celui d'être devenu un pére de famille exemplaire et celui aussi d'avoir gardé la seule amitié sincère, celle de la mer.Avec elle il peut discuter.Il peut philosopher.

    Et dans les flots tumultueux il retrouve un calme olympien.Une intimité profonde.

    Retenez la leçon.La vie est aussi simple que ça.

    Rabah Oudjani

    el-hadef  du 2.11.1983

     

     

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