• On achève bien les mythes

    On achève bien les mythes

    La grande course puis le déclin.Le MPA ou la chute d'un grand.En arrière-fond un passé glorieux.

    DESCENDRA, descendra pas...?La question Défraye la chronique.Tout le monde en parle.En termes crus, en pleurant, déçus ou trahis, sereins ou profondément blessés.Qui pour vider son sac, qui pour se dire-descendra, descendra pas-.

    Quelques frères "ennemis" du Mouloudia ont accroché à Bab-El-Oued une banderole de "Bienvenue" en Régionale.L'USMA, puisque ce sont ses supporters, y est déja depuis quelques saisons.Ses matches l'ont rendue justement cèlébre face au Mouloudia.Deux mythes puissants et deux grandes écoles aujourd'hui toutes deux reléguées au bourbier du tuf.

    Y en a qui ont ri et d'autres n'ont pas apprécié du tout.Jusqu'à ce jour, l'espoir était encore permis.La rumeur alors s'empara du doute et le retourna en calvaire.D'autres crient au "sabotage"; moins volubiles, d'autres vous diront "Normal, c'est prévisible".

    Pour tout ce beau monde la chute prend l'ampleur d'une vaste conspiration.Contre le Doyen des clubs, contre les racines.Bencheikh encore sous le choc dira "je n'aurai jamais cru voir un jour des hommes pleurer..." Mais pourquoi des hommes pleurent? Pour le foot? pour mille raisons, qui font dire à El Hadj Brahim, l'un des fondateurs et joueur du Mouloudia Chaâbia d'Alger..."j'ai le coeur brûlé..." Simplement remercié depuis la réforme de 1977.

    Lors d'une réunion bilan qui s'annoçait chaude, il a tenu a assister pour rapeler qu'au temps de la "Chaâbia"  "dans une équipe on se serrait les coudes".Devant une assemblée silencieuse et sous-tension, El Hadj Brahim a parlé des années des années de guerre, de l'esprit de la "Djemaïa", de l'association qui a servi la Révolution avec ses dirigeants et ses martyrs.

    Descendra, descendra pas? Le quotidien "El-Moudjahid" annonce en premier la relégation de l'ESM Bel Abbés, le lendemain la FAF réctifie et désigne le MPA pour la descente en Nationale deux.Se considérant "lésés", l'ASP des pétroliers d'Alger a recours à Maître Berchiche avocat conseil de la Sonatrach et met en cause "l'interprétation de l'article 63b"...Ainsi que le caractère..."confus et manquant de clarté" du texte.L'ambiguïté dans cet article vient du fait qu'il ne prévoit que la seule hypothèse du goal avérage particulier, qui en principe, se déroule entre deux équipes à égalité de points.Cette saison et pour la première fois , il y a trois équipes.A propos de l'interprétation faite a posteriori par la FAF, Bencheikh nous dira "D'abord le texte n'est pas précis et ensuite quinze jours avant la fin de la saison , la FAF aurait dû publier le règlement de la relégation".Chacun fait et refait les comptes.Un point içi, moins deux là..."non, le compte est bon" nous dit un fonctionnaire du ministère.Les supporters du Mouloudia rappellent que l'ESMBA "a eu un point en plus, alors que le match contre Ain Mlila a été arrêté".Mais d'une façon générale les plus sceptiques diront la relégation vient du troisième but de Guelma, à la dernière minute, contre le MPA.Troisième but fatal? Essayer de faire le goal avérage partriculier à la place des mots croisés et vous trouverez peut être que l'os est ailleurs.Comment se fait-il, se disent les joueurs et les proches que le doyen des clubs, l'un des plus grands et des plus riches du pays, se trouve en dernière position...Menacé de la relégation?.

    Pour Kamel Bouchama ministre des sports..."C'est un cas de mauvaise gestion de la saison, pour moi ce n'est pas le Mouloudia qui descend, mais le MPA".Etrange nuance qui a le goût de la mort du Mythe.Un mythe vivace pourtant "c'est une équipe malade !" a dignostiqué Bachi,le docteur de l'équipe; plus précis Betrouni avoue son scepticisme:"il y a eu plus de onze entraîneurs depuis la réforme".

    Le palmarès de l'équipe est éloquent.Une première coupe d'Algérie contre l'USMA à l'occasion de son cinquantenaire, sa cinquième coupe en 83, cinq fois champion et au sommet: le triplé (non encore égalé) championnat, coupe et coupe d'Afrique, en 1976.Du moins c'est ainsi que le Mouloudia est entré dans le sigle de la SONATRACH.Alors commence la galère, timidement au début (champion en 77et 78) puis la tempête, quatre années durant.1979, des joueurs essentiels quittent le MPA visés par une note leur imposant la limite des trente ans.Betrouni, Kaoua, Bachta, Zemmour, Amrous et Bachi n'avaient à l'époque que 27-28 ans.1983 le MPA décroche la coupe avec comme entraîneur ...Kaoua.

    A son retour d'un stage de recyclage à vichy (France), il trouve à sa place Kermali, nommé par le nouveau président Haouach.La personnalité de l'entraîneur, connu pour ses bons résultats à Sétif tempère un peu les choses.Auréolée de son titre, l'équipe s'envole pour la RDA en stage de préparation.Là, la crise éclate."Mais...nous arrête Bousri,... dès le début les choses ont pris une mauvaise tournure.Haouach et Kermali ont tout fait pour que ça ne marche pas".Aucun programme précis et au bout de trois jours, c'est la tension extrême.Kermali, nous dit Bencheikh, voulait nous imposer une discipline militaire.Nous ne sommes pas des voyous et nous respectons les gens qui nous respectent". Kermali à son tour invoqua: "l'indiscipline des joueurs".

    A la fin, plus personne ne se parle et à dis jours de la fin du stage, les joueurs décident de rentrer; refusant à paris de jouer contre Monaco et le Paris Saint Germain sans...Bencheikh, Bellemou et Bousri, s'opposant une dernière fois à Kermali.Merzekane et Khelloufi (DNCA) signataires au MPA depuis deux mois sont refusés.

    Sans Kermali, l'équipe continue de s'entraîner, aidée de quelques bénévoles.Au bout d'un mois, la FA convoque tout le monde puis après trois matches, Bellemou, Bencheikh et Bousri sont suspendus jusqu'à la demi-saison.Kermali revient.Bousri et Mahiouz signent à Médéa, Bellemou n'est pas retenu, tandis que seul Bencheikh reste.Début 1984 Kermali s'en va sur la pointe des pieds au bout d'une saison au lieu de quatre, Haouach fait de même, juste après, au milieu de la saison,  comme il est venu.Il se trouve aujourd'hui, selon les joueurs, confronté à la Cour des Comptes pour avoir empoché leur pécule, lors du fameux stage en RDA.En tout cas , les joueurs affirment n'avoir rien reçu "Mais tout le monde a compris...s'étonne Betrouni, que l'équipe ne tournait pas rond, il y avait cinq milieux de terrain au lieu de deux, d'autres n'étaient pas à leur place.L'équipe tournait à trente pour cent de ses capacités."Et ça c'est le problème de l'entraîneur et des dirigeants"

    Le Mouloudia en était là, et Boumdal, l'actuel directeur administratif de l'ASP invoque deux raisons importantes..."D'abord l'instabilité des entraîneurs et en dernier Kermali qui a rompu son contrat, ensuite il y a le statut de l'athlète de performance.Il est considéré comme un travailleur salarié avec une prime de match fixe de 200 DA depuis 1977".Et comme tous les matches n'ont pas la même importance pour l'équipe; la prime fixe ne stimule rien du tout.L'on pense à cet effet, dès cette année, à relancer les comités de supporters afin de "mieux stimuler les joueurs".Comme la carrière d'un footballeur ne dure pas longtemps, l'intelligence du métier voudrait qu'il tienne bien son devenir.Sinon? sinon il finira comme des générations de talentueux footballeurs fous, alcoolique ou a peine sorti de l'auberge.Les fantômes sont là, pour raviver quelques plaies et inviter à lus de prudence ceux qui montent.

    Coincé , le joueur est en quelque sorte pris entre un semblant de professionnalisme et une image d'amateur.Pour l'imagerie, on regarde de leur côté comme de nouveaux riches.Oubliés déjà ceux qui ont avalé leurs crampons ou ont mal finis.Ils appartiennent déjà à la légende.Celle dont une partie était ce jour au stade d'El-Biar pour disputer un tournoi en hommage à Moha.Imaginez un peu le MCA contre l'USMA et le CRB contre El Biar.Rien que de voir évoluer Bachi, Zenir, Mahiouz, Bachta, Betrouni, Branci, Djebbar et le fabuleux Amirouche de Kouba, technicien racé, Ahmed Arab du CRB encore meneur de jeu.Rien que de voir Zenir raté un pénalty fatal contre l'USMA, on se dit que quelque chose a changé.En tout cas ce n'est déja plus le même esprit...Pour Bouchama "il n'y a plus de prospection , de sélection et de contrôle.Nous ne cachons tous derrière la réforme.Quels sont ses aspects négatifs? Les ASP ont été bureaucratisées.On prône la théorie sur le travail effectif sur un terrain.La réforme est devenue tabou.Il y a des gestions occultes, fourbes dans beaucoup d'ASP".Par la force des choses le foot est devenu une affaire d'argent et de pas mal d'autres paramétres.Mais, nous n'en sommes pas là, les mythes sont encore vivaces.La légende du Mouloudia curieusement ressurgit à l'occasion de sa relégation.

    En écho aux sombres années, plus précisement un 7 août 1921, elle a porté le nom du jour de la naissance du prophète, de surcroit en plein Ramadhan.Pour une date de naissance, elle est plutôt chargée de sens .Et comme pour confirmer une vocation précoce, le Mouloudia est né la même année que l'Etoile Nord Africaine.Enraciné très tôt dans la conscience populaire, elle est l'image d'une conquête de l'espace politique par le foot et l'esprit naissant de la "Djemaïa".Elle perdit son premier match contre l'Elan de Bab El-Oued...par six à zéro.Aouf le président fondateur dépensa toutes ses économies, vendit trois immeubles hérités de sa tante pour éviter que l'équipe ne déclare forfait.La relance ne se fit pas attendre puisque dès 1928, il crée une école de footballe qui ne prendra réellement son essort qu'en 1930-1931.C'était rappelez-vous l'année du cenenaire de la colonisation,Un débarquement fut même simulé sur le sable de Sidi-Ferruch.

    Indistinctement, tous les milieux populaires s'y reconnaissent, militants politiques, ouvriers du port et du rail, boxeurs, musiciens chaâbi...El Hadj Mrizek qui en fut le président d'honneur, au temps du café Malakoff, en fit "le club le plus célèbe d'Afrique du Nord..."dans une chanson.Une bonne partrie des combattants de la bataille d'Alger sont passés par l'école du club.Tombés au champ d'honneur, Ferhani, Bourkika, Ouargli entre autres (El Hadj Brahim en dénombre quarante...) Yacef Saâdi en fut un joueur, Temam, les ministres Benyahia, Brerhi en furent des dirigeants...

    Si-Chérif, cheminot se rappelle bien cette époque au temps du derby entre le Galia et le MCA.Pour la finale du championnat d'Alger en 1955-1956-ASSE- Mouloudia, l'arbitre refuse le but de l'égalisation, un drapeau sort des tribunes inférieurs réservés aux musulmans.L'armée et la police chargent et font quelques blessés.Pendant sept ans, le Mouloudia refuse de participer aux compétitions, en accord avec le FLN.

    Au temps des années folles, du port, de la Casbahdu quartier de la Marine, du café El Kamel, Malakoff...L'espace était à reconquérir.Le stade fut en quelque sorte le moment intense de cette quête.Un idéologie de la libération avant son terme.

    Les couleurs étaient au vert et rouge bien avant l'étile, le blanc et le croissant.Abderrahmane Aouf disait en 1921 à un administrateur inquiet des couleurs: "le vert c'est le paradis et le rouge l'enfer".Un mélange au goût aujoud'hui étrange puisque plus personne ne gère la légende.

    Abdelkrim DJILALI

    ALGERIE ACTUALITE N° 1028-Semaine du 27 juin au 3 juillet 1985

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