• Une leçon de sportivité

    Les valets paix talonnent le roi violence…

    Samedi 17 Juin 2006

    Par Anis Djaad

    Evidemment, les parieurs ne gagnent pas à tous les coups. Il leur arrive de tout perdre quand leur pronostic s’intéresse vicieusement aux fins de matchs tempétueuses. Le bras de frères MCA-USMA fin consommé dans l’arène gazonnée de Chéraga, les adeptes des calculettes n’auront pas à additionner ces frétillants «dommages collatéraux». L’après-midi violent auquel beaucoup s’attendaient n’a simplement pas eu lieu. Quelques incidents par-ci par-là que connaissent tous les stades du monde, à moins que le hooliganisme soit devenu une tradition purement algéroise. Les paris les plus fous vont s’évanouir une seconde fois. La prétendue «nuit rebelle», qu’aurait concoctée le camp isolé des casseurs, était plutôt étoilée. Les supporters du légendaire Mouloudia vont décrocher la leur dans un ciel chargé. Une cinquième dédiée à l’amour de la Dame coupe et une énième, à leur sens, prononcé pour les décors des grandes kermesses foot. A saint-glinglin, les couleurs du club le plus populaire d’Algérie fleurissent sur les vieux balcons. On ne retient pas entre quatre murs une jeunesse vorace d’espaces d’expression. Ce soir, enchantement jusqu’à la lie, la rue lui est reconnaissante.
    Tellement généreuse qu’elle l’accepte avec ses excès, aux limites de la transe citoyenne. Celle-ci va vite se dédire, les peurs certaines d’avant match retombent de très haut. Des dizaines de supportrices ont eu, elles aussi, droit à porter le maillot des vainqueurs et à défiler en nocturne sous le regard jaloux, pourtant si fier, de toutes ces mamans fredonnant sur les bancs publics d’El Kettani. Les embouteillages ne relèvent pas du domaine «privatisé» d’une poignée de voleurs à la tire. Des familles entières (plus chauvines du côté de Bab El Oued ?) ont eu tout le plaisir de patienter à bord de leurs Victoria, à admirer la beauté du spectacle dansant offert par les Mouloudéens. Sur toutes les places d’Alger, le respect a forcé la main à la confiance retrouvée. Les préjugés, -nul ne peut nier leur mutation en dépassements réels-, s’effaceront d’eux-mêmes au fil d’une nuit gracieusement folle. Révolu ce temps où le bâton redressait les esprits trop tordus. L’ordre se démocratise à son tour, présence et vigilance accrues suffisent à elles seules à parer aux desseins voyous. L’efficacité préventive mérite déférence. Une si belle victoire sur laquelle ont flotté les couleurs du grand perdant de la saison ne se gâche pas par le fait d’un noyau réduit de trouble-fête. En foot comme en politique, le dernier mot revient de droit à la majorité. Celle du Mouloudia a eu toute une nuit pour faire respecter le sien, tant les chants de la non-violence ont forcé à l’étouffement, les cris d’une haine qui n’a plus sa place nulle part. Le doyen mérite mieux que la brutalité d’une bande de casseurs. Ressortiront-ils leurs barres de fer à la première défaite mal digérée ? La «paix des frères» ne se construit pas en un flottement difforme des étendards de clubs fétiches mais nécessite responsabilité partagée par tous. La culture du fair-play n’est pas une affaire de quelques heures d’apprentissage. Elle s’apprend d’abord sur les bancs de l’école, ensuite dans cette même rue où l’on guette un projet de société plus rénovateur qu’il en est. Ce jour-là, les jeunes valets de la paix auront toutes les chances de battre les rois bourreaux de la violence.   

    A. D.

    « Un faux préjugé de casseursUSMA-MCA Les frères «ennemis» ? »

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