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KERMALI l'homme du titre en 1999
Abdelhamid Kermali.
(Entraîneur MCA 1983-88/99)
"Le "cheikh", toujours jeune "
Il est de notoriété publique, Sétif a été de tout temps un généreux réservoir de talents ayant défendu avec loyauté les couleurs nationales. Par devoir de mémoire, il est important de sarc-bouter sur un cas précis qui a valeur dexemple : la carrière de lun des dignes fils du mouvement sportif national en général, et du football en particulier, en loccurrence Abdelhamid Kermali, qui a fêté le 19 mai 2006 ses 75 printemps.
Carrière de loin brillante et féconde en tant que joueur et en qualité du seul entraîneur à avoir offert à lAlgérie la coupe dAfrique des nations (la seule dailleurs), en 1990, et un autre trophée afro-asiatique. La qualification des juniors pour la phase finale du Mondial du Japon en 1979 est luvre du cheikh. En cette période de vaches maigres, le football algérien peut senorgueillir de la contribution dun homme qui a bourlingué plus de 60 ans dun stade à un autre, dune contrée à une autre et dun pays à un autre. Kermali, qui sest distingué beaucoup plus comme manager, fait partie de cette race dhommes passionnés qui ont fait et marqué lhistoire du sport roi, chez nous. La vie de Kermali qui a ouvert les yeux à Akbou (Béjaïa) le 27 avril 1931 na pas été facile. Laîné dune lignée, qui en comptera deux frères et une sur, devient « majeur » en charge dune famille, à lâge de 10 ans. Et ce, suite au décès du père (militaire de carrière) au début de la Seconde Guerre mondiale. La disparition de Lakhdar un Sétifien de souche a beaucoup marqué Abdelhamid (dit Karboua) et sa famille qui ont, dès lors « sombré » dans la misère. Le jeune a de ce fait vécu et grandi dans le dénuement le plus total. Son enfance et adolescence sont faites de pauvreté, de difficultés de tous genres et aussi de rêves devant laider à sortir de lornière. Jamais il noccultera le moindre aspect des pénibles conditions dune jeunesse « confisquée ». Lorphelin sera des années durant livré à lui-même. Son contact avec lécole na pas dépassé le seuil du cours de fin détudes primaire. Le bonhomme qui a traversé les bancs dAlbertini (Mohamed Kerouani) comme un météore avait dautres chats à fouetter que de passer le clair de son temps enfermé entre quatre murs. « Pour avoir négligé puis abandonné mes études, un jour dexamen, jai reçu des corrections à nen plus finir de ma mère, fatiguée de courir les champs à ma recherche. A aucun moment, elle neut le moindre espoir de me voir prendre des distances avec le ballon rond », dira Kermali qui a été découvert par Benaouda (Lyass), Abid et Abdelkader Laklif, ces dénicheurs de talents qui sillonnaient les terrains des quartiers populaires, Tels Bel Air, Tandja (cité Yahiaoui), les cheminots, la Gare, Bon marché et le centre-ville où habitait Kermali qui fit son entrée en équipe seniors, en 1948, à lage de 17 ans. A loccasion dun certain USFMS-AS Bône. Avec deux buts à la clé, ce coup dessai fut, le moins quon fuisse dire, un coup de maître. Kermali gagne vite en maturité et simposera rapidement comme un incontestable titulaire du flanc droit de lattaque usmiste. Ses prouesses emballent les initiés, savourant à chaque spectacle le style, les accélérations et ouvertures lumineuses de ce jeune. A lissue dun match de coupe USFMS-Etoile de Skikda, disputé à Constantine, un colon qui a été vraisemblablement épaté par la classe du Sétifien, lui signifia quil devait tenter sa chance en France. Cette proposition lenchante, lui donne même des idées. Dautant quil voulait faire du ballon rond une profession. Sans se soucier des conséquences Kermali qui sest fait un nom à côté de Souna, Sahraoui, Assassi, Safsaf, Selami, Lakhlif II, Zaiar, Kari Amara Djeridi et bien dautres figures, et, sur un coup de tête, prend, un jour, la direction dAlger où il a signé une deuxième licence à lUSMA. Cette « fugue » na pas été du goût des Grenat. A défaut dune longue aventure à Soustara qui sest achevée au bout de quelques mois, Kermali est obligé la mort dans lâme de revenir au bercail. Cette aventure lui vaut une suspension de deux années. La sanction accentue la galère du joueur qui devient du jour au lendemain chômeur. Pour sortir du « trou », lexil taraude lesprit de laîné dune famille vivant toujours dans la misère. Un jour, il subtilise 10 000 francs à la vieille et prend le chemin de lHexagone. Mulhouse sera la première étape. La première saison (1955/56) en France sera un régal pour les amateurs de la technique raffinée. Cette remarquée et remarquable entrée en la matière, attire les recruteurs et imprésarios. Les sollicitations de lAS Cannes (un club de D II) où évolue un autre Sétifien, feu Mokhtar Arribi, ne laissent pas indifférents la nouvelle star qui voit désormais grand. Après un round de négociations, Kermali, rejoint à Cannes le grand Mustapha Zitouni.
Un palmarès bien rempli
A la croisette, le petit Sétifien explose, étale toute sa classe, impressionne coéquipiers et adversaires. Malgré, un handicap de gabarit, Karboua, se comporte tantôt comme ailier tantôt comme avant-centre, et des fois comme passeur. A lissue de la saison (1956/57), lOlympique lyonnais qui vient de sattacher les services de Troupel (lex-coach de lAS Cannes), fait les yeux doux à Kermali. La présence de lentraîneur susnommé et dune importante communauté démigrés à Lyon, le pousse à rejoindre le pays des Gones. Kermali réalise à côté dAndré Laurent (capitaine de léquipe de France), du Brésilien Costantino et dautres vedettes, une saison de rêve. La seconde sachève pour lui et pour bon nombre de professionnels algériens, un dimanche 13 avril 1958. A lappel de la patrie, Kermali (Lyon), Arribi (Avignon), Bouchouk (Toulouse F.C), et Mekhloufi (As Saint Etienne), formant le groupe des Lyonnais, qui a transité par la Suisse et lItalie, rejoint dimanche 20 avril 1958, Tunis où allait débuter lépopée de la glorieuse équipe du FLN. « Le combat mené avec mes compagnons qui ont eu la chance de faire lhistoire restera à jamais gravé dans ma mémoire », précisera le cheikh ayant tenu à rapporter le témoignage de Ferhat Abbas : « Les ralliements des footballeurs démontraient, à lévidence, aux yeux de lopinion internationale que la révolution et la guerre dAlgérie intéressaient tous les Algériens. » A lindépendance, le cheikh réintègre lUSMS qui rachète son contrat de Lyon. Kermali a failli disputer à lissue de la première saison sportive (62-63) de lAlgérie indépendante une inédite et historique finale de coupe (ESS-USMS) mais lES Mostaganem, lors de la demi-finale, en a décidé autrement. Avant de rejoindre lEntente en 1966, avec laquelle il décrocha en 1967, une coupe dAlgérie en qualité dentraîneur joueur, Kermali sest durant trois saisons (1962-66) beaucoup investi à lUSMS. Le défunt Dekoumi, président de lEntente, engage celui qui allait devenir des décennies durant le Héléno Herra algérien. Le « sorcier » va bouleverser le jeu de lESS. Un football vivace, fait de petites passes, prend la place des longs dégagements et des folles chevauchées. Ce technicien de première ordre est devenu, en matière de stratégie, un pionnier. Il peut se targuer dêtre le premier entraîneur à avoir introduit le 4-3-3 en Algérie. Axé sur un plan, préalablement, élaboré en fonction de ladversaire, le jeu à Kermali ne laisse rien au hasard. La griffe du cheikh ayant donné à laigle noir sétifien une âme, une personnalité, la spécificité déquipe technique ainsi que le légendaire second souffle marqueront pour longtemps lESS, lautre religion de milliers de supporters. La méthode du Vieu, a fait de lui, lun des techniciens les plus sollicités. Il est lun des rares coachs à avoir drivé des formations de lEst, (USMan- CSC- USC- HBCL- CABBA- USMS et ESS), du Centre (MCA) et lES Mostaganem, de louest du pays. Sa réputation a, faut-il le rappeler, dépassé les frontières. Kermali, qui se dit pompier quand il aborde le volet de léquipe nationale, a dirigé lItihad (Libye), Ras El Kheima (Emirats) et lAS Marsa (Tunisie) où il a effectué durant trois saisons un travail de titan. Ses trois passages au MCA (1983,1988 et 1999) sont les autres faits saillants dune longue et brillante carrière : « Mon expérience avec le Mouloudia qui occupe une bonne place dans mon cur était exaltante et enrichissante à la fois. Cest un honneur dentraîner ce club mythique. Je suis autant fier et heureux davoir arraché un titre avec le club le plus populaire du pays. Il mest impossible doublier les moments passés dans cette institution, dirigée à lépoque par des hommes de la trempe de Djouad, Drif, Haouche et bien dautres dirigeants, dignes dune formation drainant à chaque sortie, plus de 60 000 supporters », souligne le cheikh qui nesquive pas la déroute de Ziguinchor : « Les douloureux événements que le pays a connus ont perturbé la préparation de léquipe nationale obligée dannuler plusieurs matches amicaux. La question des tenues, des primes, et du séjour au Maroc sest répercutée négativement sur le rendement de léquipe qui na pas pu défendre le titre acquis deux ans auparavant à Alger. Quatorze ans après, la plaie est toujours entrouverte. Je tiens, une fois de plus à assumer la responsabilité de cet échec », rétorque le cheikh nayant jamais tourné le dos à lappel de la patrie : « Dès que léquipe nationale est en mauvaise posture, on fait appel à Kermali et à Zouba qui ont répondu présents en 1990 et lors des éliminations de la coupe dAfrique des nations de 2004. Certaines personnes, aux mémoires courtes, ont tendance à oublier, vite, les services rendus », déclare quelque peu gêné, Kermali qui a tout donné à la nation. Il a même sacrifié sa vie familiale qui a été des décennies durant reléguée au second plan. Dieu merci, de nombreux sportifs qui ont côtoyé ou non ce personnage dune extrême gentillesse en dehors du périmètre vert lui sont reconnaissants. Le témoignage de Mohamed Djouad, le président du MCA, est à ce titre éloquent : « Parler de cheikh Abdelhamid Kermali constitue pour moi un honneur, et un devoir de mémoire envers une personne qui ma profondément marqué. Cheikh Kermali restera lun des meilleurs, si ce nest le meilleur avec lequel jai eu à travailler. En le citant, je ne pourrai occulter les qualités de lhomme dabord, car il a été pour moi un grand monsieur, fin communicateur, perspicace et pondéré. Lentraîneur Kermali a marqué son temps par sa rigueur et sa gestion sportive. Et au-delà de ses consécrations, il restera celui qui a drivé léquipe nationale juniors pour être championne dAfrique et quil a qualifiée au Mondial japonais, et celui qui a ramené la seule coupe dAfrique des nations en 1990 en Algérie. Dommage quon nait pas associé à ce grand entraîneur des jeunes qui auraient beaucoup appris à ses côtés. La clairvoyance du cheikh nous a permis de remporter le titre en 1999 avec le Mouloudia. Je dirai merci à Si Abdelhamid pour tout ce quil nous a procuré comme joie et bonheur. » « Kermali qui est un perfectionniste est un des monuments du mouvement sportif national.
Il est en matière de choix tactiques inégalable. Le « bétonneur » ne sest jamais empêché de mettre les jeunes dans le bain. Ce quil a fait avec lUSMS à lindépendance, MCA quand il a congédié les vedettes et lEntente où il a lancé les Zorgane, Rahmouni, Serrar, les frères Bendjaballah, Rahmani et autres, qui en sont les parfaites illustrations », nous confie Daoudi Saadna, ami et ex-coéquipier de Kermali qui demeure du haut de ses 75 ans toujours disposé à reprendre du service, car il vit pour et par le foot, sa seule et unique passion. Lami des journalistes qui ne lont pourtant pas ménagé, après la déroute de Ziguinchor, trouve, malgré le poids de lâge, encore du plaisir à parler foot et à vouloir encore exercer laussi stressant métier dentraîneur.
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