• Mon Mouloudia c'est unique

     

     

     

    Cela s’appelle le Mouloudia d’Alger

     


    Par Abdelhakim MEZIANI -Mardi 04 Septembre 2001


    De nombreuses familles algéroises attendaient Hamoud Boualem, figure emblématique s’il en est de la culture citadine et du raffinement. C’est, finalement, et contre toute attente, le groupe Khalifa qui devient le principal sponsor du doyen des clubs algériens, alors que Sonatrach en est le principal partenaire.
    La nouvelle a fait l´effet d´une bombe dans les milieux citadins, à Alger comme à Tlemcen, à Miliana comme à Constantine, à Dellys comme à Ghardaïa, à Médéa comme à Béjaïa où le club cher à La Casbah éternelle compte énormément de véritables supporters. A Alger, par exemple, où des mécènes comme les fondateurs de Hamoud Boualem, Bensiam, Benmerabet, Mouhoub, Benchicou ou Tamzali ne sont plus de ce monde pour relever un tel défi, les vieilles familles algéroises sont très choquées par le fait que leur progéniture reste sur la défensive alors que sauver le MCA et le rendre à ses enfants, doivent constituer la préoccupation cardinale, une mission historique. Surtout aujourd´hui, à un moment où l´espace citadin s´effrite chaque jour davantage à l´instigation de la culture de l´oubli et du mépris affiché par les clercs qui ne lèvent même pas le petit doigt pour le sauvetage d´un pan insondable de notre mémoire. Je veux parler de La Casbah d´Alger.
    Repliée sur elle-même, depuis plusieurs siècles déjà, exactement depuis l´assassinat du roi Sélim et-Toumi par Aroudj Barberousse, la société algéroise a pourtant donné le meilleur d´elle-même dans la prise de conscience du fait national et l´émergence d´une dynamique culturelle salutaire. Une dynamique qui aura permis à la contestation nationale, dès 1920, de s´appuyer sur le mouvement culturel et sportif pour opposer notre identité historique et culturelle nationale aux moyens de la ruse et aux tentatives d´asservissement spirituel et civilisationnel mis en branle, à l´époque, par la caste coloniale.

    Une des formes les plus actives de la résistance
    C´est dans cet esprit d´ailleurs qu´intervient la naissance du Mouloudia Club d´Alger, un espace d´expression qui va jouer un rôle déterminant dans la conscientisation des citoyens. Expression culturelle par excellence, le sport allait ainsi contribuer, dans ce cadre, à la promotion et à l´épanouissement de jeunes Algériens qui ne se reconnaissaient nullement dans le projet de société tel qu´élaboré par la soldatesque française sur la base de sa supériorité civilisationnelle et scientifique.
    Dans cet univers de souffrances et de violences, me confiera mon ami Omar Dib, le rappel incessant au passé glorieux, la défense du patrimoine culturel et artistique, les poèmes et les chants citadins, constituèrent l´une des formes les plus actives de la résistance face à l´occupant. Ce qui fit dire à Charles-Roger Ageron que les poètes et les initiateurs d´un tel mouvement ont bien mérité de leur peuple. Ils se sont montrés des gardiens vigilants. Ils ont dit jusque dans leur désespoir, l´invincible espérance d´un peuple croyant, que l´aube du siècle dernier galvanisa, annonciatrice qu´elle était de bouleversements en profondeur et de l´émergence de potentialités religieuses, artistiques, culturelles, intellectuelles et sportives insoupçonnées. Lorsqu´en 1930 naît l´association El-Djazaïria, la première société musicale musulmane, en pleine célébration du Centenaire de la colonisation, les milieux citadins ne manquèrent pas de pavoiser, tournant en dérision la culture de l´autre. Les rapports fructueux qui s´établirent alors entre le Mouloudia et les défenseurs du patrimoine musical classique algérois, parmi lesquels il est aisé de citer les Bensiam, Benteffahi, Bestandji, Lakehal, Khodjet el-Khil, les frères Fekhardji et bien d´autres encore, allaient contribuer valablement à l´émergence d´une vie artistique et culturelle jusque-là insoupçonnée. Notamment au siège de Nadi et-Taraqi (Cercle du progrès), avant que ce haut fait de la pensée nationaliste et de l´expression artistique et culturelle, ne soit réduit à sa plus simple expression par l´intolérance religieuse, symbolisée à l´époque, par l´imam El-Okbi, fraîchement installé à Alger grâce à une prise en charge et des subsides offerts généreusement, pourtant, par de vieilles familles algéroises, avec à leur tête Mohamed Benmerabet.
    C´est ainsi que le patrimoine musical citadin trouvera en le Mouloudia Club d´Alger un partenaire idéal qui mettra à sa disposition ses propres structures, tant pour les répétitions que pour les concerts qu´animaient, à l´époque, Mohamed Benteffahi et Mahieddine Lakehal.

    Le Mouloudia d´Alger n´est pas un club ordinaire
    Mahieddine Bachetarzi, Abdelkrim M´hamsadji, Mohamed Khaznadji, Mustapha Skandrani et Mouloud Djazouli, le doyen actuel des membres fondateurs du MCA, parlent de cette période avec beaucoup de respect et de satisfaction, puisque la même expérience sera renouvelée avec El-Mossilia, en 1932, puis Gharnata et El-Mizhar, jusqu´au jour où le chanteur nationaliste Hadj M´rizek, par ailleurs athlète du Mouloudia, enrichit cet espace par l´introduction de concerts chaâbi avec la participation du cardinal, cheikh Hadj M´hamed el-Anka.
    Rappeler ces quelques hauts faits d´un club qui a contribué pleinement au raffermissement du sentiment national et à la guerre révolutionnaire populaire est loin d´être fortuit, encore moins une vue de l´esprit. Car le MCA n´est pas un club ordinaire. Il est, et demeure, à l´image de La Casbah qui l´a vu naître, le fer de lance civilisationnel et culturel d´une société qui a brillé, et brille encore par son raffinement, son savoir-vivre et son savoir-faire, nonobstant le mépris politique dont elle a toujours été victime depuis l´Indépendance à ce jour et l´état d´amnésie dans lequel semble se complaire sa jeune progéniture.

    La citadinité et le raffinement ne s´achètent pas
    Comme le disait si bien, en réponse à une question en relation avec un éventuel retour aux affaires de Abdelkader Drif, le porte-parole de la section football, M.Azef, fils d´un des plus grands joueurs du MCA, le Mouloudia a besoin de la mobilisation de tous ses enfants, sans exception aucune. Et il n´a pas tort. Car un immense chantier attend ce club : la mobilisation et la conscientisation des supporters, ou prétendus tels, dont certains, et non des moindres, n´ont rien à voir avec le sport, flagornés qu´ils sont par des écrits autant irresponsables que déstabilisateurs, quand ils ne sont pas au service d´autres clubs. A titre d´exemple, si elle a manqué de réussite, l´équipe qui a affronté Bordj Bou-Arréridj n´en a pas moins bien tourné, nonobstant quelques erreurs tactiques engendrées par la crainte de concéder une première défaite sur son propre terrain. Et après! Une équipe ne se reconstitue pas du jour au lendemain, et des supporters qui ne s´éclatent qu´en cas de victoire ne sont pas de véritables défenseurs de leur club. Si le raffinement, la sportivité et la respectabilité devaient revoir le jour sur les cendres d´une adhésion irresponsable de quelques pseudo-supporters qui ternissent l´image d´un club sur le point de devenir centenaire, il est des enfants véritables de la famille mouloudéenne qui seraient les premiers à y souscrire et à refuser qu´une cérémonie de présentation de maillot, la première à se tenir dans notre pays, ne connaisse pas les mêmes honneurs que celle qui fut organisée à Marseille...Ceci est une autre histoire, en attendant le réveil des établissements Hamoud-Boualem et de quelques mécènes en mesure de démontrer que la citadinité et le raffinement sont loin d´être le produit d´une vision mécaniste de la promotion de l´être humain. Ils ne s´achètent pas, ils sont en nous, ou ne le sont jamais... s'appelle le Mouloudia 


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     Mon père fredonnait des airs et il a fini par me transmettre le virus de la chanson. Alors un jour, je me suis décidé. Pourquoi ne pas intégrer une association après mes cours à l'école Sarouy ? A l'époque, il y en avait deux : Djamiaât el Hayat domiciliée au cercle du Mouloudia place de Chartres et El Mossilia. » Mohamed s'inscrivit dans la première avec comme professeur Abderrahmane Benelhocine, disciple de Ahmed Sebti dit Chitane.
     
     
     
     
    Mohammed Kheznadji,
     
     
    l'Andalousie, la Casbah et le Mouloudia au cœur
     
     
    La chronique de Abdelhakim Meziani
    Publié dans Liberté le 30 - 05 - 2009
     
     
    S'il a choisi un chemin parsemé de notes musicales, il n'a pas oublié pour autant que chanter n'est pas la seule alternative à opposer à la culture de l'oubli. C'est assurément pour cette raison qu'il a repris le témoin de cheikh Mahieddine Lakehal et de Abderrahmane Belhocine pour veiller à son tour à la transmission du témoin. S'il est l'enfant adulé de la société citadine d'Alger et des autres lieux de mémoire emblématiques de ce merveilleux pays, sa voix cristalline vous transporte et fait resplendir les céans les plus tristes. Depuis l'Association de musique classique algéroise El Hayat, créée à l'initiative du Mouloudia Club d'Alger, il ne cesse d'étonner tant par son art que par son insondable humilité. Qui ne se souvient pas de l'éclatant succès remporté en 1995 en terre américaine, plus exactement à New York et à Washington, par l'un des plus grands chantres de la musique classique algéroise ? La chaleur et la ferveur avec lesquelles le New York Times avait accueilli le concert de Mohammed Kheznadji, rapporte la télévision algérienne, traduit on ne peut mieux les nouvelles qui nous parvenaient toutes frémissantes encore des enthousiasmes d'un public particulièrement heureux de découvrir quelques fragments des siècles d'or de l'Andalousie arabe, berbère et vandale. Témoignant si besoin est de la richesse et de la magnificence d'un patrimoine qui renoue à chaque concert avec ses époques de gloire, le somptueux hommage que lui a rendu la semaine dernière l'Etablissement Arts et Culture et la presse algérienne est loin d'être usurpé. Il ne fait que conforter l'admiration que lui vouent de nombreux mélomanes dans les nombreux pays où il eut à se produire parmi lesquels le Maroc, la France, la Belgique, l'Italie, la Hollande, la Tunisie où les médias locaux ont admiré son passage rapide de la note la plus élevée dans les aigus à des degrés qui vont de la tierce à l'octave inférieure. Né en mai 1929 à la Casbah d'Alger, à l'image des grands maîtres que compte le patrimoine classique algérois, il a constamment baigné dans un milieu familial où la musique occupe une place de choix. Dans un milieu citadin très au fait de la richesse et des subtilités d'une muse tantôt adulée, tantôt décriée à l'instigation de contingences imposées à la réalité concrètes par des dissonances à l'honneur dans une société sempiternellement appelée, à chaque impasse politique et sociale, à se replier sur elle-même avec l'espoir de se préserver. C'est justement dans un milieu familial, où la musique fait partie de l'air que les citadins respire, qu'il se forgera une personnalité marquante. Une détermination surtout, qui lui fera vite entrevoir une kyrielle de possibilités allant de l'apprentissage à l'épanouissement artistique et culturel. Une vocation merveilleusement irriguée par des parents dont le moins que l'on puisse dire est qu'ils auront réussi à lui inculquer le sens du beau, la noblesse et la délicatesse des sentiments. Du reste, la dimension mystique à l'honneur à la Casbah d'Alger y avait grandement contribué. Porté par une ferveur nationaliste et un penchant insondable pour l'illumination soudaine et la voie soufie, le Vieil Alger connaissait des moments fastes grâce à des personnalités marquantes à l'image de cheikh Abdelhalim Bensmaïa, à des espaces emblématiques comme Nadi Et Taraqi, créé par la bourgeoisie citadine algéroise sans oublier le mausolée de Sidi Abderrahmane at-Thaâlibi où le chant religieux et les mouloudiate faisaient le bonheur des vieilles familles de la médina.
     
    Cheikh Mohamed KHEZNADJI l'Andalou et le Mouloudia
    Parcours
     
    Mohamed Khaznadji est né en mai 1929 près de La Casbah, précisément à la cité Bisch. Il a fait ses études scolaires à l'école Sarouy. Il a été influencé par son père qui vendait des instruments de musique traditionnels pour s'adonner à l'art lyrique. La musique arabo-andalouse devint alors sa passion. Il a été l'élève, pour une courte durée, du maître Belhocine, avant de passer sous la direction de Fakhardji. Il anima des émissions à la Radio d'Alger. Il a été imprimeur à Belcourt. Dans sa vie professionnelle, Mohamed fit carrière au PTT, où il fut inspecteur général. Il a formé de nombreux élèves et reste, à 79 ans à l'écoute de tout ce qui se fait dans le champ musical.
     
     

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